De nombreuses entreprises suisses emploient des travailleurs frontaliers, qui désirent parfois travailler à domicile. Toutefois, la législation en vigueur ne leur laisse qu’une marge de manœuvre limitée en la matière. Des questions de sécurité sociale, de droit fiscal et de droit du travail doivent être clarifiées afin d’éviter des conséquences négatives pour les employeurs et les employés. Il est notamment recommandé de stipuler dans le contrat de travail quel droit du travail s’applique à la relation employé-employeur, et dans quelle mesure le télétravail depuis l’étranger est envisageable.
Cotisations sociales
La Suisse, tout comme les États de l’UE et de l’AELE, participe au système européen de coordination des assurances sociales s’appliquant aux ressortissants suisses et des États de l’UE/AELE. En principe, concernant l’assujettissement, le règlement en vigueur prévoit que:
- l’employé n’est soumis qu’à un seul système de sécurité sociale, en règle générale celui de l’État sur le territoire duquel il travaille (règlement (CE) No 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, art. 11, al. 1);
- l’employé qui travaille en Suisse tout en exerçant une part substantielle (25% ou plus) de son activité dans le pays de résidence de l’UE/AELE, devra être affilié auprès du système de sécurité sociale de ce pays, et non aux assurances sociales suisses (règlement (CE) No 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, art. 13);
- la part de 25% est, en général, déterminée au prorata du temps de travail total;
- le calcul s’effectue sur la base de la situation prévue pour la période des 12 mois à venir.
Pour des informations plus détaillées, veuillez vous référer au mémento 2.12 "Assujettissement à l’assurance" du Centre d’information AVS/AI.
Toutefois, à partir du 1er juillet 2023, un nouvel accord multilatéral permet aux travailleurs frontaliers de ne pas subir de changement d’État d’affiliation en matière d’assurances sociales en cas de télétravail inférieur à 50% (du temps de travail total) dans certains États (voir nouvel accord).
La liste des États concernés et des explications sur les conditions d’application de l’accord peuvent être consultées sur le site de l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS).
À noter que lorsqu'un employé se trouve dans une situation où les conditions d’affiliation aux assurances sociales suisses ne sont pas ou plus réunies, l'employeur suisse devra s’acquitter des cotisations sociales auprès de l’organe compétent à l’étranger. Il devra notamment connaître le montant des cotisations, l’organisation du système de sécurité sociale du pays en question afin de remplir ses obligations légales. Cela peut entraîner une charge de travail supplémentaire non négligeable.
Les cotisations sociales à l’étranger peuvent s’avérer plus élevées qu’en Suisse. Même involontaire, une affiliation non réglementaire peut entraîner de graves conséquences pour l’entreprise et l’employé.
Pour de plus amples informations, les employeurs peuvent faire appel à leurs caisses de compensations AVS, qui constituent l’entité compétente en matière d’assujettissement aux assurances sociales.
Imposition du revenu
La Suisse et la France sont parvenues à un accord pérenne concernant le télétravail des travailleurs frontaliers. Depuis le 1er janvier 2023, il est possible d’exercer jusqu’à 40% de son activité en télétravail de part et d’autre de la frontière franco-suisse sans remettre en cause le régime d’imposition habituel du travailleur frontalier.
En Allemagne, en cas d’emploi à temps plein, le statut de frontalier peut être conservé à condition que l’employé se rende au moins une fois par semaine sur son lieu de travail en Suisse.
L’imposition des frontaliers résidant en Italie (dans un rayon de 20 km autour de la frontière suisse) fera l’objet dès le 1er janvier 2024 d’un nouvel accord adopté en mai 2023 par les deux parties. L’accord prévoit que les autorités compétentes des deux pays revoient périodiquement les conditions du télétravail transfrontalier (voir accord entre la Confédération suisse et la République italienne).
En l’état actuel (août 2023), les frontaliers sont tenus d’exercer sur le lieu de travail en Suisse pour prétendre au régime d’imposition des frontaliers. Les revenus perçus lors d’un éventuel épisode (même d’un seul jour) de travail à domicile doivent être imposés en Italie.
Avec la fin du régime spécial d’imposition mis en place durant la pandémie, les travailleurs frontaliers résidant en Autriche ne bénéficient, pour l’heure, d’aucun régime fiscal particulier en lien avec le télétravail.
Tout revenu issu de l’activité professionnelle exercée à leur domicile reste soumis à l’imposition de leur État de résidence.
Droit du travail
Il est vivement recommandé de préciser explicitement dans le contrat de travail le droit du travail qui s’applique. En l’absence de mention du droit du travail applicable dans le contrat, si une part importante du travail est effectuée à l’étranger, l’application du droit du travail suisse peut être remise en cause.
Toutefois, si le contrat de travail stipule que le droit de travail applicable est le droit suisse, alors celui-ci s’appliquera également aux travailleurs frontaliers, même en cas de télétravail dans leur État de résidence.