"Reprendre une société existante permet de prendre un bon départ"

Racheter une PME offre de nombreux avantages. C'est l'expérience faite par Bernard Fuhrer qui a repris la brasserie bernoise Felsenau il y a une année.

Voilà 138 ans que la Brasserie Felsenau est installée à Berne sur les rives de l’Aar. Fondée par Johann Gustav Hemmann, l’entreprise a vu se succéder cinq générations de la même famille à sa tête, jusqu’en janvier dernier. C’est à cette date que Bernard Fuhrer, 38 ans, a repris la direction de la PME comptant 18 collaborateurs fixes. Pourquoi a-t-il racheté une société plutôt que d’en créer une nouvelle? Quelles sont les leçons à tirer de son expérience? Interview.

Pourquoi reprendre une entreprise existante?

Bernard Fuhrer: J'ai toujours été fasciné par les PME et le monde des affaires. Je me disais que je saisirais l’opportunité de me lancer si elle se présentait. Au début de l’été 2017, j’ai appris par hasard que les propriétaires de la brasserie Felsenau cherchaient un repreneur car il n’y avait pas de solution interne à la famille.

Avez-vous un intérêt particulier pour le domaine de la bière?

Fuhrer: La bière est un produit émotionnel. C’est aussi un marché en pleine mutation. Autrefois, il y avait un cartel des bières alors qu’aujourd’hui, on compte plus de 1000 brasseries régionales plus ou moins grandes en Suisse qui apportent de nouvelles saveurs.

Le fait de reprendre une entreprise familiale comporte-t-il des défis particuliers?

Fuhrer: Oui. C’est évidemment une chance de pouvoir reprendre une entreprise solidement établie et qui dispose d’une riche tradition, mais vous ne savez pas comment le marché va réagir. J’ai également dû gagner la confiance des employés, leur montrer des perspectives d’avenir et leur expliquer comment fonctionnerait l’entreprise sous une nouvelle direction.

Comment la brasserie Felsenau se positionne-t-elle sur ce marché toujours plus concurrentiel?

Fuhrer: Nous sommes une brasserie régionale principalement active à Berne et dans ses environs, avec aussi une présence en Argovie, à Soleure, Fribourg et dans le Haut-Valais. Notre objectif est de produire des bières de haute qualité qui répondent aux atteintes de nos clients. Notre assortiment compte huit bières différentes, dont une variante sans alcool. À une exception près, ce sont toutes des bières à basse fermentation, pour une production annuelle d’environ 2,5 millions de litres. Nos clients sont principalement des restaurateurs de la région, mais aussi des grands détaillants comme Coop, Denner ou Spar, ainsi que de plus petites échoppes.

Combien de temps a duré la transmission?

Fuhrer: Six mois se sont écoulés entre la première prise de contact et la signature du contrat. Il y avait, bien sûr, beaucoup d’éléments à clarifier. J’ai notamment mené des discussions avec les maîtres brasseurs et le directeur des ventes avant la reprise pour m’assurer qu’ils resteraient dans l'entreprise et soutiendraient mon projet. Le processus de "due diligence" (ndlr: audit ou ensemble des vérifications qu'un acquéreur doit mener avant une transaction) a également pris un certain temps.

Comment s’est déroulé le financement de l’opération?

Fuhrer: Le processus s’est déroulé sans accro. J’ai reçu un soutien financier de ma famille et conclu un crédit vendeur avec les anciens propriétaires (ndlr: le paiement au cédant est échelonné et ce dernier participe au financement de l’opération). Les banques ont également apporté leur soutien. Nous avons la chance que la Banque cantonale bernoise soutienne les entreprises locales pour de telles transactions.

Avez-vous fait appel à des experts ou à un organisme spécialisé?

Fuhrer: Il est essentiel d’être bien entouré. Étant économiste d’entreprise, j’ai pu m’occuper des aspects financiers, mais j’ai fait appel à des experts pour les questions juridiques et fiscales, l’examen des contrats et la due diligence. Il faut aussi quelqu’un qui dispose d’une vue d’ensemble du projet, de manière à savoir exactement quels documents restent à fournir. Cela permet de garantir une certaine rapidité du processus de succession.

Comment se sont déroulés vos premiers pas à la tête de l’entreprise?

Fuhrer: La transition s’est très bien passée, avec une phase de six mois durant laquelle les précédents dirigeants m’ont accompagné pour la transmission des dossiers et rencontrer les clients. Les cadres et le personnel m’ont aussi beaucoup aidé pour que le transfert se déroule tout en douceur durant cette première année.

Quel bilan tirez-vous de cette première année?

Fuhrer: Ce fut une bonne année, avec une croissance du chiffre d’affaires, principalement grâce au beau temps, un élément essentiel pour le marché de la bière. Le printemps a commencé très tôt, l’été a été très beau et chaud et l'automne a duré presque jusqu'à la mi-novembre. Bien sûr, nous avons aussi bénéficié de la Coupe du Monde de football.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite se lancer dans l’entrepreneuriat en reprenant une entreprise?

Fuhrer: En premier lieu, il faut posséder de très bonnes connaissances de la branche que l’on souhaite investir. Ensuite, il faut mener des discussions approfondies avec les personnes clés de l’entreprise visée, en particulier les cadres, pour être sûr qu’elles resteront en place après la succession. Il faut aussi faire appel à des experts qui puissent fournir des conseils avisés en matière financière, juridique ou fiscale. Cela permet d’effectuer des vérifications en profondeur durant la due diligence, une étape à laquelle il est d’ailleurs essentiel d’assister personnellement.

Le mot de la fin?

Fuhrer: Je ne peux que recommander la succession à ceux qui souhaitent se lancer dans l’entrepreneuriat. Reprendre une entreprise existante permet de prendre un bon départ, en disposant d’un marché établi et d’une bonne réputation. De plus en plus d’entreprises seront disponibles à la reprise ces prochaines années. Il est important qu’il y ait des jeunes gens qui souhaitent prendre un risque entrepreneurial pour préserver le tissu des PME suisses.


Informations

Biographie

Bernard Fuhrer, repreneur de la brasserie Felsenau

Bernard Fuhrer, 38 ans, a repris la brasserie Felsenau en janvier 2018. Diplômé en économie d’entreprise à l’Université de Berne, il a travaillé auparavant pour la société fiduciaire BDO AG, où il s’occupait notamment d’accompagner des entreprises durant leur processus de succession.

Dernière modification 16.01.2019

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